HENRY LEBESGUE


La mesure des grandeurs



Henri Lebesgue est l'un des grands mathématiciens qui ont surmonté au début du vingtième siècle toutes les interrogations et les difficultés nées de l'approfondissement de la logique mathématique.

Mais, avant toute autre chose, Henri Lebesgue demandait aux futurs enseignants de ne pas perturber auprès de chacun de leurs élèves ce qui était pour eux déjà des notions, des savoirs établis :
   « Conduire à la notion de volume ! C'est pour nous une notion première ; je veux dire acquise par les enfants avant que nous nous en mêlions. Le bambin qui s'écrie : « Mon tas de sable est trois fois gros comme celui de Renée » a la notion de volume. » (Message page 184)

« La mesure des grandeurs engendre les nombres ; elle n'utilise pas des nombres antérieurement définis de façon abstraite [ … ] » (A propos de la mesure des grandeurs, Œuvres scientifiques volume V, page 190).

[…] Nous avons la chance unique d’avoir à notre disposition une langue universelle, la numération décimale écrite, utilsons-là. (Henri Lebesgue, Sur la mesure des grandeurs).

[…] Notre enseignement n’utilise pas encore pleinement ce fait historique, le plus important peut-être de l’histoire des sciences : l’invention de la numération décimale. (Henri Lebesgue, Sur la mesure des grandeurs).

Dans l’enseignement primaire, et dans les premières classes de l’enseignement secondaire, on apprend aux enfants ce que sont les nombres, sans définitions savantes ou prétentieuses, en leur faisant manier des nombres. D’abord des entiers d’un seul chiffre, puis ceux de deux chiffres, puis les entiers quelconques. A l’occasion, par exemple, du système métrique ils apprennent l’usage de la virgule et s’habituent au maniement des nombres décimaux. Dans cette partie de l’enseignement les nombres sont bien les comptes rendus d’expériences de dénombrement ou de mesure dont j’ai parlé ; à aucun moment on ne les entortille dans la métaphysique.
    D’autre part, on apprend aux élèves à manier les fractions ; soit à l’occasion de fractions, soit à l’occasion de divisions, comme celle de 1 par 3, ou à l’occasion d’extractions de racines carrées, les enfants rencontrent des nombres qui ne peuvent être écrits qu’à l’aide d’une suite infinie de chiffres. On se garde bien d’attirer trop leur attention sur ce fait, de leur dire que c’est effrayant et déconcertant et les enfants ne sont ni effrayés ni déconcertés.
    Si bien qu’on admet dans la suite de l’enseignement que la notion de nombre est acquise, et que l’on peut parler des opérations sur les nombres quelconques. On arrive alors au carré de l’hypoténuse, on calcule la diagonale (racine de 2) d’un carré, en géométrie ; en algèbre, on introduit les règles relatives aux signes dans les opérations1, mais on suppose connues les opérations sur les nombres positifs. […]
    1 En passant, je fais remarquer que si l’on définit les opérations sur les nombres positifs et négatifs comme nous venons de le faire pour les nombres, mais en remplaçant l’emploi des segments non dirigés par l’emploi des vecteurs, les règles relati

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